Il
y a des découvertes un peu étranges qui vous font toujours un
franc plaisir. Surtout quand on pense connaître un peu ce pays.
Un soir de novembre de l'année dernière, pour couronner un séjour
particulièrement agréable, détendu, on m'invitait chez Bernard
pour une bonne petite bouffe.
Piqué
par ma curiosité gourmande, j'essayais d'en savoir un peu plus
sur ce lieu perdu - le mot est faible - dans les collines au
nord de Tavira.
Bernard
qui nous vient d'Algérie après être passé du côté de Paris,
vous prépare une cuisine française paraît-il bien agréable dans
sa petite maison qui peut recevoir quelques personnes si vous
le prévenez à l'avance.
Une
petite lampe fixée près de la porte nous accueillait dans le
noir et le calme de cette nuit de novembre. L'endroit, au bout
d'une piste, ne m'aurait pas interpellé si on ne m'avait assuré
qu'il s'agissait bien d'une bonne table.
On
passe une petite porte pour se retrouver dans un décor hétéroclite
avec une table unique au fond. Personne d'autre ce soir-là,
le couvert est déjà mis pour nous qui étions deux. Une musique
jazzy et un petit Porto vous réchauffent déjà l'âme et
le corps.
Dans
ce décor, je trouve même une antique publicité pour le tabac
gris belge de Menin dont mon grand père faisait la contrebande
à la frontière franco-belge, un peu au nord de Lille, dans les
années 1940.
Bernard
vous offre le choix d'une cuisine signée française mais un peu
plus colorée qu'à Paris. Une crêpe au fromage en entrée, un
filet de Saint-Pierre relevé d'une fine sauce et un dessert
chocolaté suivi d'un Calva nous ont régalé ce soir-là, plus
étonnés de profiter de ces plats ici en Algarve dans un lieu
aussi déluré que de la cuisine en elle-même.
Les
résidents permanents en Algarve me comprendront très bien. Le
poisson grillé d'ici a beau (ou bon) avoir été créé par les
Dieux dès que l'homme a eu faim, l'exotisme est partout
relatif. Et puis, le lieu est si peu conventionnel, inclassable,
ne cherchez pas le restaurant ou la table d'hôte, ou toutes
ces formules si élaborées.
Ici,
c'est simplement Bernard qui aime vous recevoir, vous préparer
des petits plats et une ambiance où vous trouverez toutes les
traces des ses pays et de ce qu'il affectionne.
Et
puis, on se dit que dans les pays si civilisés et réglementés
un peu plus au nord, ça ne pourrait plus exister.
Que
nos décrets d'administrations publique et européenne n'entament
jamais ces lieux de plénitude et de plaisirs simples, il ne
nous resterait alors plus qu'à passer la mer. C'est bien pour
ça que Bernard reste bien discret, vous comprenez que
je respecte ses volontés...
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