Depuis de nombreuses années maintenant, je fréquente ces régions. Non pas qu'une agence de voyage m'y amenât un jour. Ma curiosité professionnelle et naturelle m'a fait ressentir un jour les vents qui venaient d'ici. Des projets et des développements importants ont suivi pour moi, liés à ces régions.

J'y ai vécu quelques années, j'y suis revenu régulièrement. Ce bout du sud de l'Europe ne laisse pas indifférent. J'ai en fait agrandi mon pays, celui d'origine se cachant dans les brumes humides du nord, au pays de Brel, à quelques villages près.

Ne cherchez pas ici l'Algarve du tourisme de masse ou de luxe qui se développe à outrance -en y constituant aussi le pilier économique- sur le littoral entre Faro, Albufeira et Lagos, mais bien au contraire un regard sur l'Algarve authentique et, de plus en plus, vers l'Alentejo qui la prolonge vers le nord et, de même, un clin d'œil vers l'Andalousie voisine.

Une grande vague de développement a déferlé ici, un monde est en train de disparaître. L'âme du pays s'est laissée enfouir par l'argent facile ou réputé comme tel, chacun ou presque est étranglé par l'endettement. Le futur n'a pas été formé ou anticipé, car souvent n'ont été élevés que des murs de béton. Heureusement, il y a des exceptions, que j'espère de plus en plus nombreuses, et j'en ai rencontrées.

Bientôt, quand l'ultime paysan de la Serra aura rangé son ultime mulet, on fouillera dans les plis de la mémoire collective, à la recherche des racines de ce pays pour en vendre l'identité révolue à prix fort. Les capitaux, le marketing, les subventions et, parfois même, les combines sont prêts. L'Algarve, tatouée de touristes, dérive sur les eaux profondes de l'illusion, au gré du rêve portugais. Le Portugal, entré en récession économique et traumatisé par les incendies, va-t-il enfin se réconcilier avec sa vraie identité encore très visible pour qui sait la discerner.

Un autre vent s'est mis à souffler pour moi, les routes de ce pays et les miennes se croisent d'une autre façon. Ce voyage-là est maintenant achevé. J'avais mis du pays de côté de peur d'en être privé pendant un certain temps et j'avais eu raison. Le voyage que je viens de faire au Portugal en ce joli mois de mai a pris un autre sens après deux ans d'absence. Ma vie portugaise a pris maintenant une tournure aboutie.

Les chemins ne sont pas linéaires, ni plats ni fuyants, ils se montrent et s'ouvrent dès que l'on s'y engage avec courage et disparaissent aussitôt derrière nos pas. D'ailleurs, il n'y a pas de chemins, il se font en marchant. Ils mènent tous au même endroit, le centre, point de départ. La corde qui nous y relie, ce sont les racines vagabondes que nous avons gardées dans nos poches. Au centre est enterré le trésor, cette lumière derrière l'ombre, qu'on découvre quand on ne la cherche plus. Mais il est vain de vouloir rendre notre chemin plus court. Si maintenant je savais où je vais, je saurais d'où je viens, puisque j'y retourne.

Bahia, Brasil

Un autre vieux rêve de voyage s'est enfin déroulé, et que j'attends de pouvoir renouveler le plus tôt possible, un voyage qui fut comme un bouchon à faire sauter, dans un Portugal décuplé, dans le cœur du Brésil, autour de la Baie de Tous les Saints, na Baía de Todos os Santos, dans une Lisbonne décuplée elle aussi, à Salvador da Bahia, dans cette ville envoûtante où rien n'est vraiment sérieux. J'ai bien envie de vous parler de ce nouvel et immense horizon. L'envie d'écriture et de photographie et de les partager me reprend petit à petit...

Alquimista, mai 2006.

Nenhum coração jamais sofreu
quando foi em busca dos seus sonhos.

Aucun cœur n'a jamais souffert
alors qu'il était à la poursuite de ses rêves.

O Alquimista, Paulo Coelho.