Si
le froid ne règne pas en cette Provence où
je vis en ce moment, c'est que les grandes ombres pluvieuses
hantent les cieux depuis bien des mois. Car ici, on aime
bien le soleil en hiver et l'ombre en été.
Les anciens plantaient devant leur maison mûriers,
platanes, micocouliers ou une grande liane pour laisser
passer chaleur et lumière en hiver et couvrir d'ombre
de leurs feuilles revenues les longues siestes de l'été.
On
ne comprend pas dans le sud pourquoi les pâles estivants
s'obstinent à prendre cette couleur écarlate
sous le plein soleil du mois d'août. Ils en oublient
la lumière blanche du nord qui donne parfois tant
de profondeur à leur ciel. Le plein soleil vif du
sud peut se déguster par contre à volonté
toute la journée en hiver.
Mais
la lumière provençale m'apparaît si
fade en ce janvier toujours un peu hésitant. Le pays
se repose du grand gavage commercial de la fin d'un millénaire
et solde déjà les premiers comptes et les
derniers restes.
Il
est bien temps de regagner le sud du sud
de l'Europe, retrouver la grande lumière, la mer,
la beauté et la liberté auprès de ces
rochers. Une longue respiration et puis j'enfilerai mon
habit de lézard immobile pour voir crépiter
la poussière de soleil sur les flots, jusqu'à
l'instant où je sentirai les îlots
fondre dans des yeux qui se ferment. Le plus difficile est
sans doute de voir ce que l'on a sous les yeux...