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Visions d'Automne
Jean-Claude Petit

 
Prologue

Autrefois, j'étais un balnéaire. Mon camp de base fut d'abord ce charmant petit village qu'était Aldeia do Meco, proche d'Espichel et de Sesimbra. J'eus une fois envie de changer. Je n'étais pas attiré par l'Algarve, par peur du monde, mais à mi-chemin entre Sesimbra et Sagres, il était un coin solitaire qui me faisait les doux yeux : l'embouchure du Rio Mira.

De timides incursions en raids plus sérieux au sud (je profitais des rares demi journées de temps gris), j'atteignis enfin un jour Vila Nova de Milfontes. Horreur : c'était noir de monde et nous n'étions qu'un jeudi, quelque part en juillet. Retour au Meco où nous avions nos "habitudes".

Quand je pus enfin prendre nos vacances en septembre, "libéré" des contraintes scolaires, et donc affranchi de la foule, j'allai résolument vers cette terre que par instinct je pressentais promise. Milfontes, il devait y avoir des furos et des poços, sinon de l'eau à gogo. Et puis c'est si joli à dire, si musical, si excitant à chuinter sur la finale "Milfont'ch".

Mon premier séjour fut idyllique. D'emblée je me crus au Maroc, ça sentait bon l'Afrique atlantique. Le Rio pouvait être même une sorte de fleuve Casamance au Sénégal. Je prenais les hérons blancs (garças boieras) pour des ibis. Qu'importaient mes illusions, j'avais trouvé là un exotisme pépère, sans scorpions.

La plage, les plages y sont immenses. A marée basse, elles s'ouvrent sur le décor lunaire de la Costa Alentejana. Moi qui n'aime la bronzette que le soir, je pouvais patauger sur des kilomètres de grèves déchiquetées, sauvages, rutilantes. Et quand la marée risquait de me coincer, je regagnais ce qu'il restait de plage par la falaise. Là-haut, je ne me lassais jamais de découvrir tout un microcosme végétal et minéral : plantes grasses, fleurs, épineux sur des roches en décomposition, mi sable, mi pierres que le vent et les embruns sculptaient en cheminées de fées, en massifs montagneux nains. Je faisais de la géologie bonzaï si vous me passez le mot.

J'étais levé aux aurores pour profiter de la vie plus longtemps. Il faisait un froid vif à 7 heures. La rosée abondante semblait suffire à nourrir la terre. Les bougainvillées s'en contentaient, impatients cependant d'éclater aux premiers rayons de soleil. A 8 heures, j'allais prendre un "acompte" au premier salon de thé qui ouvrait, je faisais provision de ce délicieux pain levé, élastique, sapide qui fait l'honneur du Portugal avec le café toujours franc et loyal, où que vous alliez. Ma Suisse nourricière à l'époque ne m'offrait pas de telles garanties en dépit de sa réputation de qualité. D'ailleurs, par parenthèse, je m'approvisionnais à Genève ou Montreux dans les magasins portugais : Delta, Sical, bacalhau, massas Nacional et enfin, grelos et nabiças de derrière le comptoir en saison. C'est dire si j'étais possédé.

Je ne jurais que par Vila Nova de Milfontes, ses plages, ses grèves, son Porto das Barcas, ses bougainvillées, ses hérons, ses loups comme ses sardines grillés dans ses marisqueiras sans chichis. Je jurais par son port (qui n'a pas changé), son château sur l'estuaire qui ne changera pas, son lacis de ruelles et ses gens : ma marchande de légumes qui m'accueillait toujours par un Olà querido ! qui me faisait frémir de volupté. Mon poissonnier taciturne qui me servait comme un roi et me glissait des cavalinhas à l'œil avec la daurade. Mon père "machin" qui cabotait en ville avec sa charrette tirée par une jument câline qu'il nommait amoureusement Hortensia. Mon boucher jovial qui appréciait ma lusophonie approximative. Et ce garçon pressé, toujours en course, toujours en sueur qui ne buvait que l'eau des fontaines et faisait cependant tous les bistrots pour taper la clope aux touristes du nord, terrorisés par le gagou du village. Il ressemblait à Tabarly. Il avait paraît-il survécu à une overdose qui aurait dû être mortelle. Et il en traînait innocemment les séquelles.

Je passais souvent trois semaines à VN (c'est ainsi que les autochtones l'appellent). La première était une réadaptation au soleil et une assimilation de la fatigue du voyage. La seconde était un rêve debout. La troisième était déjà ternie par la perspective du retour en octobre, les brumes du Léman, les sous-vêtements, le boulot…

Petit à petit, Vila Nova de Milfontes changea. Les prix grimpèrent sous la poussée tellurique de l'immobilier… la dérive des continents, vous savez. Et ce fut un séisme dont l'épicentre me semblait se situer principalement en Algarve et secondairement à Lisboa. Les traces sont plutôt visibles. Des Residenciais, des residências, pensões à n'en plus finir, des rues entières de terra batida livrées aux pelleteuses et cet ensemble simili néo mauresque qui trône encore sur un terrain vague.

Mais Porto Covo, à dix kilomètres, a connu pire et en dépit de tout, Vila Nova reste telle qu'en elle-même l'éternité l'a faite.

Retour à Vila Nova

Elle était encore plus belle en ce 26 octobre sous 25 ou 26 degrés. Le Maroc, quoi ! On comptait les touristes. Ils se répartissaient en jeunes et bien moins jeunes couples d'Allemands, de Scandinaves et de Français. Et cette lumière à vous griller les rétines ! Et ces plans bleutés de la côte, estompés dans les embruns. Et ces franges éclatantes d'écume dès après la barre ! Dire qu'on appelle ça des spots dans le jargon des surfers. C'est réduire l'indicible beauté à vraiment peu de choses.

Je logeais dans un superbe studio meublé avec vaste, cuisine terrasse et tout, à 200m de l'estuaire : 25 € la nuit, c'était plus qu'honnête. Retenez Apartementos Atlântico. Fernando Almeida, le patron, devint plutôt un copain. Je pouvais tout lui demander : faire laver mon linge par l'impeccable (et très belle) femme de ménage, connaître les nouveaux bons coins, me renseigner sur l'opportunité de tel achat de bien. Fernando m'a permis d'ailleurs d'éviter une belle boulette en me faisant un cours magistral sur l'économie et le marché immobilier. Le séisme dont je parlais plus haut… eh bien il paraîtrait, selon lui, que tout va bientôt dégringoler, en termes de prix s'entend. Mais revenons à nos bons plaisirs.

Retrouvailles

J'ai fait ma cuisine pendant une semaine, forçant sur le poisson, car il y avait belle lurette que je n'avais pas vu tant de variétés d'une telle fraîcheur. Mon lexique personnel s'est d'abord rafraîchi puis considérablement enrichi. Et puis je suis devenu le Français un peu zinzin qui grimpe sur les étals pour photographier la brillance des "zeuils", l'argent des sardines, le rouge des cantarils, le nacré des buzios et j'en passe pour ne pas reléguer ma marchande de légumes aux oubliettes.

Olà querido !

Cela faisait cinq ans que je n'étais pas venu et elle m'a reconnu ! Olà querido ! Mais en cinq ans et deux semaines d'immersion, j'avais fait des progrès :
      - Olà querida ! Como estas ? Sempre jovem, sempre bonita !
Et nous nous sommes embrassés. J'étais en quelque sorte "de la famille" et je vous jure que j'étais ému aux larmes. Présentation da minha mãe, da minha filha et enfin de compte de mes légumes : espinafres (tétragone), cenouras, agriões (cresson), uvas… Et j'ai fait bombance midi et soir, ne m'octroyant que deux sorties au restaurant. A Fateixa sur le port et O Portinho do Canal, au Porto das Barcas, où j'ai retrouvé les vraies marisqueiras avec vitrine et choix au doigt et à l'œil plutôt que sur une carte mal traduite.

Le soir, je me prélassais aux terrasses des bistrots, écoutant le ressac ou faisant des connaissances. Alors que je regardais la lune se mirer dans le Rio Mira, Tabarly m'est apparu. Ciel, le coup de vieux en cinq ans! Moi aussi, je suppose…Mais lui, plus Tabarly que jamais. Il fumait ses propres Suave. Il transpirait du front modérément. Il m'a raconté que le temps était incertain, qu'il fallait se dépêcher de pêcher et puis il a disparu dans une ruelle, aussi vite qu'il était arrivé. Encore une chose qui m'a ému.

Epilogue

Pour en finir avec Vila Nova, je dois avouer que j'ai failli craquer tant j'y ai connu de bonheurs concentrés, faits de retrouvailles et de découvertes. J'ai écumé la Serra da Cabra à quelques kilomètres et j'ai été conquis par la beauté des herdades et des chemins fleuris. J'allais acheter un appartement à 14 km, pour être au plus près et à moindres frais de VN, mais je me suis dégonflé. J'étais mal préparé à vrai dire et mal armé juridiquement. Merci Fernando.

Merci aussi à l'ouvrier de la station Galp qui a bichonné ma voiture souillée par 1300 km de moustiques et de papillons. Car s'il est une station au monde qui fait laver les voitures à la main puis au tunnel, vous essuie la moindre goutte résiduelle à la peau de chamois propre, c'est celle-là. L'opération dure 25 minutes. Elle coûte 5,50 €. Je reviendrai donc à VNdMF. Et si j'ai dit en titre "je t'aime moi non plus", c'était pour faire de l'ironie bon marché. Car je l'aime, cette garce !

Informations sur Vila Nova de Milfontes
Milfontes.net
Milfontes.net
Vila Nova de Milfontes fait partie du concelho de Odemira
Page © Alquimista.net, 27 janvier 2003
Texte et Photos © Jean-Claude Petit, optimisées Alquimista
Matière fournie par les Lecteurs : lire les conditions d'utilisation du site
 

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