Tout
le monde sait que l'hiver va venir. En ce début octobre
l'été n'en finit pas. Alors nous nous configurons
en absorbeurs d'instants "inespérables".
Le beau temps et le soleil chaud s'apprécient jusqu'à
la dernière goutte, comme la bourride de chez Michel,
les dernières boules quand on range l'arbre de Noël
ou comme quand on va quitter la plage le dernier soir avant
de renter. Depuis hier, il pleut.
Plaisir :
Haricots
verts (à rame Fortex). Pour midi, les haricots peuvent
se faire en soupe avec une sauce crème (yaourt si
régime) au curcuma qui est appelé açafrão
ici. Cuire les haricots à l'anglaise (plonger dans
l'eau bouillante salée additionnée d'un soupçon
de bicarbonate, ne pas couvrir). Pendant qu'ils cuisent,
faire la sauce/soupe bien déliée du mélange
crème-épice. Mélanger dans l'assiette.
Le tout se mange tiède, c'est un mélange doux-croquant.
Nul ne vous critiquera si vous terminez avec un verre de
vin blanc (Catarina - Terras do Sado 2002).
Muito prazer :
Cailles
au chou rave (inspiré des perdrix aux choux). Les
cailles se cuisent à la cocotte avec un jus court
au vin blanc et les aromates usuels (thym, laurier, romarin).
Baptême au cognac obligatoire. Nous utilisons l'Aguardente
Velha Tapada da Ajuda, 12 ans de vieillissement. Rareté
chère à José-Antonio - feu notre
voisin et ami. Ces cérémonies exigent de très
grands alcools, ne mollissez jamais sur le choix du cognac.
8 minutes avant la fin de la cuisson, soit après
que les oiseaux auront cuit 4 minutes, versez le chou rave
(coupé en gros dés - non blanchi) dans la
cocotte. Ce plat se fait avec des cailles achetées
à Odemira et les bouchées s'entrecoupent
de larges lampées de Garrafeira 1996 de chez
Cortes de Cima, le bien nommé. Vin somptueux
qui s'épanouit longuement dans des arômes d'automne
sur la note porteuse typée du cépage Aragonês
: Tutti.
Potager :
Poivrons,
concombres, tomates etc. Semis de petits pois et de fèves
: Jadis Aguadulce était un petit village -
en Andalousie, à côté d'Almeria
- où on cultivait les fèves au bord de la
mer. C'est (me dit Alquimista) une culture traditionnelle
d'hiver du sud de la péninsule. Elles produiront
en février et après. Nous faisons un essai
de "Giant exhibition longpod", variété
anglaise.
Visites :
T de Terrugem
Grand
événement pour le jardin, Alquimista vient
nous visiter. Diagnostic rapide : Il faut rentrer les céleris
raves; arracher, laisser reposer, mettre au froid et forcer
les barbes de capucin. Les racines d'endives ne sont pas
encore prêtes.
Alquimista
a déjà tout cultivé, si vous avez une
question, il connaît la réponse. Désillusion
: mes topinambours ne sont pas des topinambours
Longues
discussions sur les idées pour 2004 : le vin surtout.
Jean-Claude
Petit rejoint la fine équipe. Lui non plus ne
refuse pas le bon vin du sud. Ouverture et dégustation
d'une bouteille deT de Terrugem 1999.
Silence et respect.
Inhame da Madeira
NDR
: ses topinambours sont en fait des ignames de Madère,
Inhame da Madeira (Colocasia antiquorum) dont le rhizome
est comestible.
"Constitui
um prato tradicional preferido durante a Semana Santa.
O inhame branco come-se cozido, acompanhado de peixe,
ou como sobremesa com mel-de-cana sacarina; também
é usual o consumo do inhame frito. O inhame vermelho
é utilizado em sopa, a qual leva também carne de porco,
couve e feijão, e é muito procurada no Funchal. As
folhas e os talos são usados para a alimentação dos
porcos" (Fonte : Produtos Tradicionais Portugueses,
Ministério da Agricultura, do Desenvolvimento Rural
e das Pescas, Direcção-Geral de Desenvolvimento Rural,
Lisboa 2001).
Jardin
de fleurs :
Ipomea violacea
Toujours
des roses. Alquimista dit qu'il faut semer les vivaces en
juin, mettre en place actuellement les pensées pour
en avoir tout l'hiver (ce que nous avons fait, mais elles
sont encore petites).
Le paysage :
La
mer. Avec les jours plus courts, le passage des nuages,
la mer change sans arrêt de couleur, de relief, de
profondeur avec le vent d'ouest elle se fait entendre
et sentir. Belle époque pour être au bord de
la mer. Chaque soir nous allons saluer le plus grand des
organisateurs de spectacle, l'océan, au moment ou
il donne sa fameuse scène du coucher de soleil. Et
chaque soir il en improvise une nouvelle version.
31
octobre
Temps :
Orages
(très beaux éclairs sur la mer le soir) suivis
de grands vents. L'an dernier ils ont cassé les cosmos,
cette année le maïs décoratif. Les belles
journées sont consacrées à semer petits
pois, fèves, à repiquer de nombreuses salades,
à piquer de l'ail et des oignons. Avec l'eau tout
reverdit.
Plaisir
:
Les citrons
jaunissent. Comment faire une bonne limonade ? Accord unanime
pour partir de citrons non traités (pas facile car
le citronnier attire les parasites -nous traitons bio à
l'huile blanche et au blanc insecticide pour les fourmis
- les alentéjans y ajoutent une pointe d'ocre c'est
joli). Le vrai citron bio est rarissime, ayez simplement
quelques citronniers chez vous (si vous n'avez pas de balcon
déménagez en Alentejo).
Eau :
chaude, froide ou gazeuse ? Les 3 se pratiquent. Nous dirons
plate, froide et de bonne qualité - la Luso
convient à merveille. Proportion moyenne observée
: 2.85 citrons/litre, écart type de 1.95 (pas
de théorie dominante). Disons : un citron entier
débité en rondelles et le jus de 3 autres
pour 5 litres d'eau.
Autres
additifs : orange, levure, limes, cerises, zeste de combava
à la rigueur une pincée de menthe l'été.
Ensuite choix critique : sucre (ou miel, ou sirop d'érable)
or not sucre ? Si vous dites oui au sucre, 100 g/l suffisent
mais on peut aller jusqu'à 200. Le choix du sucre
impose de conserver la limonade au réfrigérateur.
Nous préférons sans sucre, comme le Champagne
: extra brut.
Durée
d'infusion : certains l'aiment à peine forte (3 heures);
préférez une semaine en bombonne de 5 litres,
secouez deux fois par jour. Filtrez soigneusement, embouteillez
en bouteilles de verre sombre, bouchez d'un bon liège
d'Alentejo, laisser reposer au frais une semaine encore.
La limonade
sans sucre se conserve un ou deux mois. Elle se boit fraîche,
joliment opalescente dans gobelet de verre. En buvant ne
pas oublier la formule rituelle : "ça fait du
bien".
Muito prazer :
Mais,
pour un citron, il est plus haut sommet. Si vous êtes
un citron, la plus grande gloire à laquelle vous
pouvez accéder est d'être confit au sel. Le
citron du jardin (lavé, pimpant) est piqué
de nombreux trous d'aiguille. Bien rangé entier dans
un bocal, il repose 6 mois dans une saumure (restons classique
100 g de sel par litre d'eau, environ 10° Baumé)
avec quelques feuilles de laurier. Il remplace brillamment
l'ail en même quantité. Tapez "citron
confit en saumure" dans Google vous allez comprendre
sa contribution aux plats de poisson et de poulet.
Pour
inaugurer la nouvelle soupière (Terrina com travessa)
que nous a fondu et travaillé José Ricardo
Rosado Marcão, rua Luis Casadinho à
Vila Viçosa : soupe de tomates vertes au citron
conflit. Chauffer doucement 2 gousses d'ail hachées,
1/3 de citron confit en saumure, une grosse courgette, 1
kg de tomates bien vertes mondées, mouiller et cuire
avec le bouillon de volaille habituel, avant de servir ajouter
de la menthe poivrée hachée (une grosse pincée).
Bel accord des saveurs, se consomme devant un feu de bois. (Si vous voulez cette soupière envoyez
un mail à alquimista, c'est 100% fait main, fonte
d'étain à 95%, un lourd morceau de baroque
rural immémorial qui donne envie de manger des soupes
intemporelles).
Potager
:
Parmi
les salades, la pimprenelle est la plus verte et la plus
heureuse. Nous la mélangeons avec laitue et chicorée.
En l'absence de cave (qui ne se font pas ici) nous avons
construit un coffre sombre (endivier) sous le mimosa pour
faire les barbes de capucin et autres endives. Les barbes
de capucin y sont installées fin octobre.
Visites :
Halloween
: les enfants viennent faire des Jack'o lantern dans les
citrouilles canadiennes du jardin. On fonce vers les plats
de bonbons, on creuse, on dessine, on découpe, on
met des masques. Ann aime bien le Jack'o lantern qui sourit
de Leo. Halloween commercial n'est pas encore arrivé
ici. Chacun repart très fier à la maison avec
bonbons, masque et potiron sous le bras.
Jardin
de fleurs :
La mythique
fleur d'artichaut Il était une fois une princesse
très belle. Le jardinier la trouvait si belle qu'il
déposa sur sa fenêtre la plus belle fleur de
son jardin : une fleur d'artichaut. La princesse se jure
d'épouser celui qui lui a fait présent de
cette fleur inconnue et si belle. Elle demande qui d'entre
les princes lui a fait ce cadeau. Tous les jours les princes
la comblent de bouquets immenses, mais jamais plus la fleur
bleue ne se montre. Un soir d'octobre, triste, elle s'en
va pleurer sur le banc du potager
Le
paysage :
Josefina,
la suédoise, nous dit :
- Je suis pourtant sûre
d'avoir bien regardé le ciel en Suède, mais
il me paraît tellement plus grand ici .
Le ciel est immense ici.